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6° dimanche de Pâques

Ac 15, 1-2.22-29 ; Ps 66 (67), 2-3, 5, 7-8 ; Ap 21, 10-14.22-23 ; Jn 14, 23-29

        La paix, c’est comme la santé. On y est habitués, on la considère comme quelque chose de normal, mais dès qu’elle vient à faire défaut, on en ressent très vite le manque, on en mesure alors son importance.
        La paix… Quel bien précieux ! Quelle chance nous avons dans notre pays de vivre en paix avec nos voisins, depuis maintenant trois générations. Nous ne mesurons pas cette chance, en effet. Nous nous y sommes tellement habitués que nous avons mis très peu de temps à nous trouver d’autres préoccupations qui finissent par nous sembler vitales. Mais dès que la paix est menacée, ces préoccupations reprennent leur juste place, au second rang, tant notre besoin de paix est primordial, tant sa privation est douloureuse. Et ceux parmi nous qui sont de la génération qui a connu la guerre et en a subi le poids le savent mieux que personne.

        L’Union Européenne s’est construite justement en vue de cette paix. Ses fondateurs voulaient mettre fin aux multiples guerres qui ont déchiré notre continent pendant des siècles, en proposant de tendre vers une communauté des peuples d’Europe. Quelle que soit l’image que l’on ait de cette Union Européenne telle qu’elle est aujourd’hui, il est important de participer à sa construction par un simple bulletin de vote, ne serait-ce que pour montrer notre attachement à la paix.

        « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » nous dit Jésus. Cette phrase que nous avons lue dans l’évangile de Jean, nous l’entendons à chaque messe, à la fin de la prière eucharistique : « je vous laisse la paix, je vous donne ma paix » Pourquoi Jésus précise-t-il « ma » paix ? il ajoute : « ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne ». Il ne s’agit donc pas de la paix au sens où nous l’entendons habituellement. Quelle est donc cette paix ?

        La paix de Jésus, ce n’est pas l’absence de guerre. Dans la Bible, la paix est un mot qui revient très souvent, presque à chaque chapitre de chaque livre. Elle désigne le bien absolu, la plénitude du bonheur. Or, un bien ne peut pas être défini par l’absence de quelque chose. C’est donc la guerre, au contraire, qui occasionne l’absence de paix. La guerre nous prive de la paix. Mais pas seulement la guerre, hélas ! Tout ce qui ne concourt pas au « bien commun » nous prive de la paix.

        La paix de Jésus, c’est le salut, qui passe par la rémission des péchés. C’est par les mots « Tes péchés sont pardonnés, va en paix » qu’il rétablit dans sa dignité la pécheresse repentante à ses pieds, dans l’évangile de Luc.
        On retrouve ce sens de la paix dans la salutation des juifs : « shalom », que l’on traduit par « la paix soit avec vous ». Jésus utilise cette expression à plusieurs reprises, mais seulement lorsqu’il apparaît à ses disciples, après sa mort et sa résurrection. Cette salutation « la paix soit avec vous » est d’ailleurs tellement chargée de sens qu’elle est réservée à l’évêque au début de la messe qu’il préside.

        « Je vous donne ma paix ». La paix dont nous parlons est donc un don de Dieu. Don de Dieu, mais qui ne peut s’obtenir qu’avec aussi les efforts de l’homme, qui doit lutter contre ses penchants naturels pour parvenir à la paix, c’est-à-dire au repos du cœur.

        Dans sa vie de chaque jour en effet, l’homme est sans cesse devant des choix. Il doit à tout moment exercer son discernement, à propos de choses qui vont de la plus futile à la plus vitale. Et tant que ce discernement, ce choix n’est pas fait, il ne trouve pas la paix, le repos du cœur. Saint Augustin, dans une célèbre louange à Dieu, lui dit : « Tu nous as faits pour toi, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en toi. » Ce repos du cœur, c’est le signe, c’est le fruit de cette paix que Dieu nous donne par son Fils Jésus. Ainsi, la paix que nous pouvons ressentir suite à un choix que nous avons fait, ou suite à notre réponse à un appel, qui nous a engagé dans un chemin, et même si ce chemin est difficile, cette paix du cœur est l’indicateur du bon discernement que nous avons fait. « Je vous donne ma paix » nous dit Jésus, et cette paix vient comme une consolation, pour nous permettre de poursuivre dans la voie où nous nous sommes engagés, si elle mène vers le bien.

        Dans la prière eucharistique, ce long passage sur la paix est conclu par le diacre : « donnez-vous la paix ». Il ne dit pas « donnez-vous un signe de paix » ou « un geste de paix » mais « donnez-vous la paix ». C’est vraiment la paix de Jésus, la paix du Christ, que nous donnons à notre voisin. Pas seulement son signe. Le signe montre ce qu’il signifie, mais ne le remplace pas. Vous connaissez sans doute cette courte parabole : « De son doigt le sage montre la lune, et le fou regarde le doigt. » Ne nous limitons pas au signe, mais faisons l’acte de foi que par le signe que nous fait notre voisin, c’est vraiment la paix du Christ qu’il nous donne.
        Cette paix que nous échangeons, nous la retrouverons en quittant cette église, parce que le diacre, décidément l’homme de la paix, nous aura adressé le dernier mot de la messe en nous envoyant à nouveau « dans la paix du Christ ».

        Concrètement, échanger la paix avec notre entourage, et pas seulement à l’église ; aller dans la paix du Christ, et pas seulement à la sortie de la messe mais tout au long de notre vie, qu’est-ce que ça veut dire ?
        Jean Vanier, le fondateur de l’Arche, récemment décédé, a dit : « il n’y aura pas de paix si on ne se lave pas les pieds les uns des autres. » La paix se reçoit de Dieu, et se vit dans le service. Dans l’attention aux autres, la paix se fait réalité concrète. Elle est à la portée de chacun, à condition de vivre dans cet état d’esprit qui nous pousse à nous mettre à tout instant au service de nos frères et sœurs en Christ.

        « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ». En toute chose, recherchons donc la paix, la paix de Dieu, la paix du Christ. D’abord en la demandant, puis en la recevant, c’est-à-dire en écoutant, en lisant et en méditant la Parole de Dieu, et enfin en mettant en pratique cette parole, dans nos quotidiens, au milieu de nos occupations ou de nos loisirs, avec nos proches ou ceux que nous croisons, au hasard de nos rencontres. Et nous verrons alors que, de cette paix qui vient de Dieu, viendra la paix intérieure, et de notre paix intérieure pourra naître la paix du monde.

La paix, la paix,
Donne-nous Seigneur la paix
    Non pas celle qui vient du monde
    Mais la paix qui vient de toi (bis)



Daniel BICHET, diacre permanent
Gétigné et Clisson, le 26 mai 2019
 

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