Il y a
quelques
semaines, nous avons présenté à nos proches, à nos amis nos vœux de
bonheur pour la Nouvelle année : santé, amour, réussite...
Mais nous ne
leur
avons pas souhaité : la pauvreté, la famine, le chagrin, ni la
détestation !
Et
cependant, Jésus annonce :
heureux les pauvres, les affamés, ceux qui pleurent, et tous ceux qui
sont
exclus de la société !
Alors, on
peut se
poser les questions suivantes :
1)
Jésus
était-il fou de proclamer de telles
paroles ?
2)
Si
la réponse est NON : en quoi ce texte de Béatitudes
est-il une Bonne Nouvelle ?
3)
Et
si c’est une Bonne Nouvelle - un Evangile - comment
le mettre en œuvre ?
1ère
Question : Jésus était-il fou, ou totalement « hors
sol » ?
La réponse
est Non !
puisque l’Évangile nous dit qu’il s’adresse à ses disciples sur un
terrain
plat ; c’est peut-être un détail pour vous…mais pour moi, ça veut
dire
beaucoup ! ça veut dire que Jésus se rend accessible à tous,
au
milieu du monde et d’une foule variée. Il est descendu de la montagne
avec les
12 Apôtres qu’il vient de choisir ; il est à hauteur d’homme et il
annonce, en
quelque sorte, le discours programme du Royaume de Dieu qui va marquer
toute sa
mission, et celle de ses apôtres.
Sa mission,
c’est d’annoncer
la miséricorde de Dieu son Père, le pardon des péchés, et la préférence
pour
les exclus…. Il a été rejeté à cause de ses paroles, au prix de sa vie.
Et peut-être
que
notre réaction aujourd’hui est la même que ceux qui ont refusé de
l’écouter,
nous avons du mal à entendre ces paroles pour nous-même ; c’est le
contraire de
ce que nous aimerions entendre : Heureux les pauvres !
On a envie
de
dire : « Jésus, tu exagères ! On aime bien t’entendre
quand tu
nous promets la Vie éternelle, on veut bien essayer de t’écouter quand
tu nous
dis que l’amour de Dieu passe par l’amour des frères, par des gestes de
solidarité ; en tout cas, on veut bien essayer…
Mais quand
tu dis :
Heureux les pauvres, les affamés, heureux ceux qui pleurent…
D’une part,
Tu « casses
la baraque » de toutes les associations qui luttent contre la
pauvreté, la
faim dans le monde, la solitude… toutes nos initiatives de solidarité,
puisque
tu dis : Heureux les
pauvres, les
affamés, heureux ceux qui pleurent… ça ressemble à une leçon de
résignation.
Et
surtout :
c’est contraire au bon sens, ce n’est pas audible,
Comment
veux-tu que
nous annoncions cette page d’Évangile aux pauvres de notre temps, aux
personnes
de notre entourage qui sont dans le deuil, ou qui sont accablés par des
problèmes de couple, de famille, de travail, ou de santé ? »
Je me fais
maintenant
l’avocat de Jésus : si Jésus peut se permettre de proclamer ces
béatitudes
qui détonnent, qui nous dérangent, c’est qu’il a vécu lui-même ce
renversement
des valeurs dans sa vie d’homme : lui, le Fils unique de Dieu, il
s’est
fait pauvre, il a eu faim et soif, il a pleuré la mort d’un ami.
J’en viens
donc à ma
2ème Question : Si ces Béatitudes ont été vécues par
Jésus, j’ai
tout de même du mal à comprendre que ce soit une vraie « bonne
nouvelle » pour nous.
Heureux
êtes-vous / Mais
quel malheur pour vous : c’est une opposition radicale.
Mais c’est
peut-être
aussi la clé de compréhension des Béatitudes comme une vraie
« bonne
nouvelle ». Car si j’écoute bien les paroles de Jésus, je crois
qu’il nous
montre les deux voies possibles pour notre vie, pour qu’on ne se trompe
pas de
bonheur.
Les pauvres
que Jésus
déclare HEUREUX sont ceux qui ne sont pas remplis d’eux même, et qui
mettent
leur confiance en Dieu.
Déjà dans
l’Ancien
Testament, le Seigneur dit par la bouche des prophètes : voilà
que
je
mets
devant toi la vie ou la mort, la bénédiction ou la malédiction. Choisis
donc la vie ! (Dt
30, 19)
Ce thème des
deux
voies nous dit aussi que nous sommes libres, nous avons toujours le
choix. Nous
pouvons choisir notre chemin et notre attitude chaque jour et à chaque
instant :
dans nos rencontres, dans nos décisions, dans nos actes, et dans nos
paroles.
C’est aussi
ce que
proclame le refrain du Psaume que nous avons chanté : Heureux est
l’homme qui met
sa foi dans le Seigneur !
C’est le
premier de
tous les psaumes. Le 1er mot du psautier tout entier est :
« heureux » !
L’auteur des psaumes a compris que Dieu veut notre bonheur : c’est
la
chose la plus importante qu’il a voulu dire pour commencer ! Et
ça, c’est une très bonne nouvelle !
Alors, 3ème
question : concrètement, comment mettre ça en œuvre dans notre
vie ?
Heureux est
l’homme qui
met sa foi dans le Seigneur. Ça veut dire, à mon avis : heureux
celui qui
écoute la loi du Seigneur, c’est-à-dire sa Voix, … Et
qui s’efforce de la mettre en pratique.
Je crois que
tous nos
efforts pour écouter la Parole de Dieu, et pour la mettre en pratique
dans
notre vie, sont autant de petits pas sur le chemin du vrai bonheur : «
Heureux
est l’homme qui met sa foi dans le Seigneur ! »
André
Chouraqui (exégète,
qui a traduit les Évangiles sous forme poétique) traduit le mot heureux
par :
« en marche ». C’est à
chacun de nous que
le Christ dit « en marche … ! »
Il nous
invite à le
suivre, à marcher sur son chemin, même si ça passe parfois par des choix
difficiles, par des renoncements, par le refus de l’air du temps, et de
la
pensée unique...
Il nous
invite à ne
pas nous tromper de chemin dans la recherche du bonheur : il nous
invite à
être BIEN-HEUREUX, et non pas MAL-HEUREUX.
Ce n’est pas
une série
de directives à observer, mais une direction à suivre.
Chacun de
nous peut se
demander pour cette semaine : suis-je assez pauvre de moi-même pour
devenir riche de Dieu ? Suis-je repu de mes certitudes, ou ai-je
faim et
soif de Dieu et de sa Parole ?
Est-ce que
je peux
refléter le visage de Jésus pour les personnes que je vais rencontrer,
et qui
sont en attente d’une parole, d’un geste ?
Et Jésus
nous encourage
et nous dit, comme à ses disciples : « En marche ! vous
serez comblés
de joie ! »
Amen
Emmanuel
MÉRIAUX,
diacre permanent
16 février
2025
Paroisse St
Louis de
Montfort