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6° dimanche ordinaire


Paroisse St Léger Ste Bernadette d’Orvault
Homélie du 11/02/2007

« Les béatitudes selon saint Luc,
et la journée mondiale des malades »

 « Heureux, vous les pauvres», « heureux, vous qui pleurez maintenant ». C’est avec ces paroles déroutantes que Jésus s’adresse à la foule, en redescendant de la montagne avec ses disciples. Ces paroles s’adressent à nous aujourd’hui. En ce dimanche, Journée mondiale de la santé voulue par Jean-Paul II, je vous invite à regarder comment les malades et ceux qui voient leurs forces décroître peuvent vivre ces deux béatitudes relatives aux pauvres et aux affligés.
La vie est parfois cruelle. Alors que nous sommes en pleine activité, la maladie, ou l’accident, brise notre vie ; la vieillesse, elle, vient jeter une ombre sur nos ambitions. Il nous faut accepter, renoncer. « Ce peut être, comme le dit le Père Rondet, une expérience déprimante, mais c’est aussi le moment où nous pouvons accueillir la grâce d’une vraie pauvreté ».

Le passage à la vieillesse est un moment de renoncement. Les forces diminuent, il faut abandonner certaines activités, les problèmes de santé se font plus pressants, « Voici le temps où l’agir créateur nous est enlevé et nous ne pouvons qu’accompagner notre diminution ». C’est ce que certains d’entre nous vivent pour eux-mêmes ou avec leurs parents… Cette période de la vie peut conduire à une crise intérieure grave, une déprime ; et c’est de toute façon une épreuve, mais elle nous appelle à grandir dans la vraie pauvreté. C’est le moment de passer, du stress à l’agenda clairsemé, du faire à l’être, de l’action à la contemplation. C’est le moment de la foi nue, de la prière simple, des fidélités profondes. C’est le temps de la confiance, de l’accueil, de l’amitié ; le temps de la sagesse, de la patience et de la transmission des valeurs.
Au sein de l’équipe de visite à domicile, j’ai vu l’émerveillement de ces visiteurs qui rencontrent les personnes âgées ou malades. Malgré leur misère, leur déchéance physique parfois, des personnes accueillent de façon surprenante : un sourire, une écoute, aucune plainte ; simplement la joie d’écouter, d’être entendu, de partager… ces visites sont précieuses pour celui qui est visité et pour celui qui visite : rencontrer et écouter ces personnes, leur donne le sentiment d’exister ; et, ceux qui les visitent s’émerveillent : Certaines personnes disent, explicitement, qu’elles attendent simplement que le Seigneur vienne les chercher… C’est bien le moment de l’abandon et de la confiance. « Heureux les pauvres, le Royaume de Dieu est à eux ».

Le temps de la maladie grave, ou de l’accident qui met la vie en péril, est aussi une épreuve redoutable. Le diagnostic avec l’annonce d’un cancer, par exemple, est un choc qui nous fait prendre conscience de notre fragilité, de notre finitude, de notre absence de maîtrise de la situation. Parfois vient le temps de l’incompréhension, de la révolte… et beaucoup de questions.
Le mal et la souffrance nous révoltent à juste titre, car ils sont absurdes, inexplicables, injustifiables. « Il nous faut renoncer, dit François Varillon, définitivement à trouver une justification au mal et à la souffrance. Même à l’intérieur de la foi, il n’y a pas d’explication au mal ». Le Christ, tout au long de sa vie, a combattu la souffrance et le mal en guérissant les malades et en chassant les démons. Et, le Notre Père ne se termine-t-il pas par « Délivre-nous du mal » ?
Ce scandale du mal et de la souffrance, ne trouve pas de réponse humaine. Il ne peut prendre sens, pour nous chrétiens, que dans la « folie de la croix », selon l’expression de saint Paul. Laissons-nous pénétrer par l’amour offert sur la croix, pour l’humanité. La mort de Jésus sur la croix, c’est l’échec total, l’anéantissement, une fin lamentable… Pendant son interrogatoire et son supplice, Jésus n’a pas répondu à la haine par la haine, au mal par le mal ; Il n’a pas rendu coup sur coup, mais Il a pardonné : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ». Et la réponse du Père, au don ultime du Christ sur la croix, c’est la Résurrection. C’est bien cette démesure de l’amour donné qui peut, seule, vaincre, en nous et autour de nous, les forces du mal. Un jour ou l’autre, nous sommes confrontés, dans notre chair, au mal et à la souffrance. Nous pouvons, alors, demander la grâce de vivre ces temps douloureux avec la force de l’Amour qui a triomphé sur la croix. « Bienheureux les pauvres, veut dire : bienheureux ceux qui aiment comme Dieu », c'est-à-dire, d’un amour total, qui ne garde rien pour soi. Toute la vie devient don. La maladie sur un lit d’hôpital est dépouillement, pour celui qui consent simplement à être, à regarder la vie en face, sa vie qui doit finir. Ce dépouillement est souffrance et « l’ultime dépouillement, c’est la mort ; et c’est aussi la condition de la rencontre avec Dieu, qui n’est qu’amour ». L’abbé Pierre, dans sa Lettre à Dieu, dit : « Mourir est, qu’on le croie ou non, rencontre… Père, j’attends depuis si longtemps de vivre dans votre totale PRESENCE qui est, je n’en ai jamais douté, malgré tout, AMOUR ».

« Heureux vous les pauvres, le royaume de Dieu est à vous ».
Puissions-nous, à travers les épreuves de la vie, faire ce chemin de pauvreté et de dépouillement qui nous permettra d’aller, au-delà de la mort, à la rencontre de notre Dieu, le Père plein de tendresse. A la fin de notre chemin sur cette terre, avant le passage ultime, pourrons-nous dire, comme sainte Claire : « Béni sois-tu, Seigneur, de m’avoir créée » ; et, à la suite de sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, nous abandonner « comme un petit enfant qui s’endort sans crainte dans les bras de son Père ». Amen


Yves MICHONNEAU, Diacre permanent.

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