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3° dimanche ordinaire



  Ne 8, 1-4a.5-6.8-10 ;  Ps 18 ; 1Co 12, 12-30 ; Lc 1, 1-4; 4, 14-21

        « Aujourd’hui s’accomplit ce passage de l’Ecriture que vous venez d’entendre. » Après avoir lu un passage du prophète Isaïe, Jésus, en une phrase, nous montre l’essentiel de ce qu’est une homélie. Car le but de l’homélie, c’est de faire de L’Ecriture une Parole, de faire du texte qu’on lit… la Parole qu’on vit. La Bible, en effet, n’est pas un vieux livre où l’on pourrait puiser de temps en temps quelques conseils de sagesse. Ce n’est pas la Parole de Dieu en conserve ; elle est vivante, la Parole de Dieu, comme le dit la lettre aux Hébreux. Et Luc, comme Jean dans son prologue, vient nous affirmer que la Parole de Dieu s’incarne en Jésus : il est le Verbe de Dieu.  Peut-être nous semble-t-il parfois que ces textes sont émoussés,  rebattus. Nous les avons entendus cent fois ; ils sont usés jusqu’à la corde. Et bien, justement, c’est cette corde qu’il faut faire vibrer pour en tirer des harmoniques nouvelles, la symphonie de la joie, la Joie de l’Evangile.
Avez-vous admiré comment les israélites retrouvant le vieux texte sédimenté du Deutéronome se mettent à pleurer de joie en entendant le scribe Esdras leur lire la Parole de Dieu. La victoire du roi Cyrus (538) marque la fin de l’Exil du peuple juif, déporté à Babylone après la prise de Jérusalem. Cette ville est dans un piteux état matériel et moral. La cohabitation entre les Juifs restés à Jérusalem et ceux qui reviennent d’Exil n’est pas bonne. Il faut refaire l’unité, et surtout retrouver le chemin de la foi commune. Ancien exilé, Néhémie est nommé gouverneur de Judée. Il demande l’aide d’Esdras. Ce prêtre convoque la foule et procède à la lecture de la Loi de Moïse (Torah). Cette lecture se fait en plusieurs étapes : proclamation du texte hébreu, puis traduction en araméen (les exilés ne comprennent plus l’hébreu), et enfin commentaire et actualisation. 
        Cette démarche a sûrement inspiré celle que nous mettons en œuvre au sein du groupe de lecture œcuménique de la Bible lors de nos rencontres mensuelles : nous lisons d’abord le texte ; puis nous cherchons à le « traduire », c'est-à-dire à comprendre les mots, le contexte historique, la symbolique de l’époque, à l’aide des notes de nos différentes Bibles ; et enfin, nous cherchons à l’actualiser, c'est-à-dire à entendre l’écho qu’il a dans notre vie et dans notre actualité sociale. Nous retrouvons ici les étapes de cette « lecture priante » de la Parole que les moines appellent « Lectio Divina ». Chez les chrétiens de différentes confessions, la Parole de Dieu est centrale : nous la retrouvons au cœur de toutes les célébrations dans notre Eglise comme chez les autres. C’est autour d’elle que nous nous retrouvons, comme nous l’avons fait cet été à Préfailles pour les 24H de Lecture de la Bible où Protestants et Catholiques se sont relayés. Même si nous n’avons pas déplacé les foules comme le prêtre Esdras, ce fut une expérience très riche pour les participants, et j’en suis sûr, aussi pour un certain nombre d’auditeurs qui se sont arrêtés devant  la chapelle ces jours-là.
        En ce dimanche situé à la fin de la semaine de Prière pour l’Unité des chrétiens, la 2ème lecture est particulièrement appropriée. La comparaison utilisée par Paul paraît évidente : le corps est un et a plusieurs membres ; de même le Christ est un et il a plusieurs membres. Et Paul conclue : « Vous êtes le corps du Christ, et vous êtes ses membres. » Cette image s’applique d’abord aux individus qui sont membres de la communauté des fidèles. Mais pourquoi ne pas l’appliquer aussi aux Eglises elles-mêmes. Ce qui signifie que les différentes Eglises confessionnelles, membres du Christ, doivent respecter, dans leur chemin pour l’unité, la diversité des charismes et la particularité légitime de chacune d’entre elles.  Et pourtant, l’unité dans la même et unique foi transmise par les apôtres doit impérativement être maintenue. L’enjeu de la démarche œcuménique, c’est de réaliser cette union sans confusion, à travers une rencontre respectueuse des singularités de chaque Eglise. L’unité des Eglises est un « mystère », une réalité profonde, à l’image de la Sainte Trinité qui est fondamentalement UNITE de l’Amour dans l’altérité reconnue.
        C’est pourquoi, il est indispensable de prier pour que cette Unité de l’Eglise Universelle nous soit donnée. Il est temps d’entrer dans la prière de Jésus : « Que tous soient un. » Il en va de la crédibilité du témoignage évangélique. Mais si nous pensons l’Unité en terme d’absorption, voire de fusion des Eglises, c’est parce que notre logique est trop déformée par la peur de remettre en question une identité qui affronte la différence de l’autre. On procède alors davantage sous forme d’opposition. Là, les points de désaccord ne manqueront jamais. Il existe une autre logique, la logique née de l’Esprit, celle de la communion. Elle part du Christ : Lui, venu nous rassembler, est plus fort que tout ce qui nous sépare. Dans le Corps que nous formons, il est la Tête. Lui seul permet de nous accepter différents. Alors, l’unité se fera dans la diversité, la complémentarité de nos richesses spirituelles.
        Ce que nous suggère l’Esprit, c’est d’être capables de nous appuyer les uns sur les autres et de nous faire confiance mutuellement. Il nous donnera ainsi la joie de rendre heureux ceux qui n’appartiennent pas encore à la famille chrétienne en leur annonçant le salut. Pour conclure, je vous laisse méditer cette pensée du Frère Roger de Taizé : « Dieu, trop éblouissant pour être vu, se rend visible, OUI VISIBLE, à travers la communion dans le Corps du Christ, son Eglise. »


Jean-Jacques BOURGOIS, diacre permanent
24 janvier 2016
Tharon et Ste Marie



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