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22° dimanche du Temps Ordinaire

Si 3, 17-18.20.28-29 ; Ps 67 ; He 12, 18-19.22-24a ; Lc 14, 1a.7-14

        C’est clair. Les textes d’aujourd’hui vont tous dans la même direction : notre bonheur consiste à imiter le Christ, notre seul modèle, qui s’est lui-même abaissé afin d’être élevé au-dessus de tous.

        Le livre de Ben Sirac le Sage, d’où est extraite la première lecture, a pourtant été écrit 200 ans avant la naissance de Jésus. Il y est question de la Sagesse, avec une majuscule, la Sagesse comme personnification de la Sagesse divine. Avec nos yeux de chrétiens, a posteriori, éclairés par les évangiles et les textes de la Nouvelle Alliance, nous pouvons le comprendre comme un livre qui nous parle de Jésus, le Christ, qui est lui-même personnification de la Sagesse, l’incarnation de Dieu dans notre histoire.

        « Accomplis toute chose dans l’humilité » ; « Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser » nous dit ce passage. C’est bien ce que Jésus a vécu. Quel homme est plus grand que lui ? Et quel homme s’est plus abaissé que lui, qui s’est fait serviteur de tous, et qui est allé jusqu’à donner sa vie ? Et Dieu, à cause de cet abaissement, l’a élevé à la première place. C’est ce que nous disons chaque samedi soir dans le cantique des vêpres, d’après la lettre aux Philippiens :"Le Christ Jésus, étant de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu, mais il s’est abaissé Lui-même, prenant la condition de serviteur, devenu obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a élevé au dessus de tout."

        Car Dieu, son penchant naturel, c’est d’élever les humbles ! Nous l’avons chanté dans le psaume, et nous l’avons redit dans l’Alléluïa.
Alors, quand Jésus raconte cette parabole improvisée au cours d’un repas, il sait de quoi il parle. Il vit ce qu’il enseigne, il s’applique à lui-même les recommandations qu’il nous fait, pour nous faire entrevoir en quoi consiste le bonheur.

        « Quand tu es invité à des noces, ne va pas te mettre à la première place, car on peut avoir invité quelqu'un de plus important que toi. » ce n’est pas qu’un simple proverbe, un dicton populaire. Il ne faudrait pas tomber dans l’erreur facile qui consiste à penser que Jésus nous fait la morale, ou nous donne des leçons de savoir-vivre. Il s’agit vraiment d’un chemin de bonheur, à travers ce discours théologique, qui nous propose deux enseignements, ou plutôt un enseignement à deux niveaux :

        Le premier enseignement, du point de vue humain, c’est qu’un chrétien ne trouvera pas le bonheur en cherchant à se mettre en avant, quitte à prendre pour cela la place de quelqu’un d’autre. L’ambition chrétienne ne peut pas être de cet ordre. L’ambition chrétienne, son chemin de bonheur, c’est de plaire à Dieu, pas de plaire aux hommes de ce monde. Ce monde dans lequel nous vivons nous inciterait pourtant à suivre une voie où seule compte la réussite individuelle. La publicité, les émissions de télévision, le comportement de la plupart des personnes publiques, qu’ils soient politiques, du spectacle, des sports ou des médias, nous présentent comme modèles des comportements individualistes qui ne semblent  plus choquer personne aujourd’hui. Même l’école, dans une certaine mesure, prépare nos enfants et nos jeunes à suivre ces comportements, où l’important est plus d’atteindre un objectif personnel que d’œuvrer au bien commun. L’individualisme est devenu une sorte de valeur à développer, et l’intérêt général n’est vu que comme la somme des intérêts particuliers. En conséquence, l’humilité est perçue comme une faiblesse, comme une attitude contre-productive dans la quête du bonheur.
        Jésus nous demande au contraire de prendre du recul vis-à-vis de nous-mêmes. Il nous propose l’humilité non pas comme une faiblesse, mais comme une force. Considérer les autres avant de se préoccuper de soi, c’est tout simplement une mise en pratique de son commandement d’amour. Aimer, c’est placer le bien des autres au-dessus de son propre confort, de sa propre satisfaction. Ce n’est pas facile, mais ceux qui aiment vraiment le savent bien. Le bonheur est à ce prix.

        Le second enseignement est théologique : il nous montre la vraie nature de Dieu. « Mon ami, avance plus haut ». Contrairement aux hommes qui remarquent d’abord ceux qui sont bien visibles, Dieu voit d’abord celui qui se fait petit, discret, humble. Non-seulement il le remarque, mais en plus il le prie de s’avancer, à la meilleure place. Il élève les humbles, c’est plus fort que lui ! Nous n’avons pas besoin de nous mettre en avant pour qu’il nous voie. Et vous l’avez remarqué, dans la formulation de Jésus, le maître de la maison ne fait pas le changement de place lui-même : il demande à l’humble de s’approcher. Comme toujours, il y a en Dieu ce respect de chacun, qui ne force pas mais qui propose.

        Décidément, notre Dieu n’est pas un dieu comme les autres ! Il n’est pas non-plus un dieu comme la plupart l’imaginent ou comme ils le souhaiteraient. Notre Dieu, le seul vrai Dieu, a une préférence pour les pauvres, les petits, les humbles. Ce que l’on a appelé « l’option préférentielle pour les pauvres », principe fondamental de la doctrine sociale de l’Église Catholique, n’est pas une invention humaine, qui viendrait d’un désir d’ajouter un volet social ou humanitaire à notre Credo. Cette option préférentielle pour les pauvres, c’est une affirmation de la nature même de Dieu, affirmation fondée sur la lecture de toute la Bible. Toute l’Écriture, en effet, manifeste cette préférence de Dieu pour les plus petits, les plus discrets, les plus humbles. L’Esprit Saint qui est à l’œuvre depuis le début de l’histoire humaine, révèle progressivement aux hommes l’identité de Dieu. Cette option préférentielle pour les pauvres est un élément fondamental de cette révélation, et constitue en elle-même un chemin de vrai bonheur.

        Alors, frères et sœurs, si nous comprenons bien que Dieu préfère les pauvres ; si Jésus lui-même nous le redit à travers cette petite parabole ; et si Jésus est bien celui que nous voulons imiter pour atteindre le bonheur, qu’attendons-nous, chacun de nous, pour choisir concrètement, dans notre quotidien, cette option préférentielle pour les pauvres ? Comment ? En mettant en pratique ce que Jésus lui-même nous propose : « quand tu donnes un festin, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ». Ce n’est pas par devoir, ou pour s’enorgueillir de faire une bonne action, c’est tout simplement pour parvenir au vrai bonheur ! en effet, Jésus termine ainsi : « et tu seras heureux, parce qu'ils n'ont rien à te rendre. »

Amen !

Daniel BICHET, diacre permanent.
St Hilaire de Clisson et Maisdon sur Sèvre
le 1er septembre 2013


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