Luc 12, 32-48
Avez-vous déjà fait l’expérience de monter un meuble IKEA ?
Vous savez : ces meubles en kit à monter soi-même : vous avez vu sur le catalogue ou au magasin une armoire, une étagère, un bureau, et vous l’espérez déjà chez vous. Vous avez l’ESPERANCE !
Vous rentrez à la maison avec un gros paquet qui contient tout le nécessaire : les planches, les vis, les clous, les trucs… Grâce au schéma de montage, vous y croyez. Vous avez la FOI !
Vous vous mettez en tenue de bricolage, et vous vous passez à l’action pour monter ce meuble par vous-même : « do it yourself ».
Eh bien je crois que cette image - un peu prosaïque et décalée - peut nous aider à comprendre, et à actualiser,
les textes de ce dimanche, et en particulier l’Évangile que nous venons d’entendre.
La parabole des serviteurs qui veillent jusqu’à l’heure du retour du maitre nous parle de l’ESPERANCE, la FOI, et la CHARITE.
L’ESPERANCE du retour du maitre (le Royaume de Dieu), la FOI qui tient la lampe allumée (l’attitude de veille), la CHARITE en tenue de service (la ceinture autour des reins).
Quel rapport avec IKEA, allez-vous me demander ? Je m’explique, et je développe …un peu longuement :
L’ESPERANCE
L’ESPERANCE de la « parabole IKEA » : c’est l’espérance de ce beau meuble que vous avez entrevu en image ou en exposition, et que vous allez bientôt avoir en réalité.
Ce n’est pas encore une réalité visible : il est en promesse ; pour le moment il est en pièces détachées, et il reste à faire, mais vous en avez l’espérance, et vous savez déjà à quoi il va ressembler. Cela va vous demander un peu de temps, mais vous savez que vous allez y arriver. C’est certain.
Dans la Parabole de l’Evangile, les serviteurs sont en attente du retour du maitre. Ils ne savent ni le jour, ni l’heure, mais ils savent que le maitre viendra, c’est lui qui l’a promis. Comme pour notre meuble à monter, il s’agit d’une ESPERANCE. Le retour du maitre est une certitude.
Dans notre vie chrétienne, l’ESPERANCE, c’est-à-dire la venue du règne de Dieu, ce n’est pas un vague espoir, c’est la promesse de Jésus.
Nous le disons dans le Credo : « Il reviendra dans la gloire (…) et son règne n’aura pas de fin. »
Même si aujourd’hui les apparences de notre monde sont contraires : les guerres, la maladie et la mort, l’égoïsme, tous les conflits liés à l’orgueil…Nous savons par l’Évangile de Jésus que l’Amour vaincra.
C’est tout le sens de la Révélation et de l’Incarnation : le projet de Dieu est de nous faire partager sa vie.
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
« Sois sans crainte, petit troupeau : votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume. »
C’est notre ESPERANCE chrétienne.
Et l’ESPERANCE est nourrie par la FOI : la FOI c’est aujourd’hui qui entrevoit demain.
LA FOI
La FOI de la « parabole IKEA » c’est : le mode d’emploi, et tout le matériel que vous avez entre les mains ; avec tout ce qui est à votre disposition : vous allez y arriver parce que vous y croyez, vraiment.
Dans la parabole des serviteurs, la FOI c’est la lampe allumée : il faut entretenir cette lampe, patiemment, maintenir la flamme, une petite veilleuse qui tremble dans la nuit mais qui ne s’éteint pas, même si la nuit est longue, et si parfois l’ennui s’installe. Entretenir la FOI, sans se décourager.
Saint Paul dit dans sa Lettre aux Hébreux : la FOI est une façon de posséder ce que l’on espère, un moyen de connaître des réalités qu’on ne voit pas.
Dans la vie chrétienne, notre FOI entretient notre ESPERANCE : elle s’appuie sur le mode d’emploi, et sur les outils que Jésus lui-même nous a donnés : l’écoute de Sa Parole, la prière, l’eucharistie, et tous les sacrements.
Tout cela est à notre disposition ; à nous de nous saisir des outils de la FOI, et de les utiliser dans notre vie : c’est ce qu’on appelle la CHARITE. Ce que nous attendons, ce n’est pas quelque chose, mais quelqu’un.
LA CHARITE
La CHARITE IKEA, eh bien, c’est comment nous utilisons concrètement le mode d’emploi et les outils, c’est notre part personnelle, pour nous approprier tout ce qui est à notre disposition, pour aboutir au résultat attendu ; ça ne va pas se faire tout seul !
Dans la parabole des serviteurs, la CHARITE c’est la tenue de service. La petite lumière de la lampe ne s’éteint pas, parce que le serviteur est dans une veille active. Le serviteur est toujours prêt, car il est en attitude, et en tenue de Service. La CHARITE, c’est de garder la ceinture autour des reins, pour être prêt à tout moment ; le serviteur n’attend pas son maitre passivement, et il est prêt, quelle que soit l’heure.
« CHARITE n’a pas d’heure », dit le Secours Catholique, et c’est vrai pour la vie de chacun de nous.
Quel que soit notre talent, et notre expérience, il y a chaque jour un service à rendre, un coup de main à donner, une attention à porter à autrui. La charité reste en tenue de service, et elle prend multiples formes, avec l’aide de l’Esprit-Saint.
Le mot d’ordre de Jésus, c’est : « Faites ceci en mémoire de moi »
Autrement dit : « Faites-le vous-même - Do it yourself ! » … comme pour le meuble en kit.
L’ESPERANCE, la FOI, et la CHARITE, c’est un programme de vie, quel que soit notre âge, notre condition. Mais ce n’est pas la conclusion de la parabole.
Parce que ma petite parabole IKEA est un peu bancale (comme un meuble mal monté) – et je vais la démonter
C’est le paradoxe et c’est peut-être la pointe de la parabole : Jésus nous invite à veiller, mais finalement il inverse les rôles ; le maitre se met au service des serviteurs qui ont veillé jusqu’à son retour, et c’est lui qui leur fait prendre place à table, et qui passe pour les servir. Le repas préparé pour lui est finalement pour tous.
Coup de théâtre : Jésus « renverse la table » et nous fait passer à table. Il est notre Salut, non pas à cause de nos mérites, de nos bonnes actions, petites ou grandes, mais par pure grâce, par pure gratuité de sa part.
« Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. »
En conclusion, Jésus nous dit que LA CHARITE, c’est une béatitude : Heureux.
Je vous laisse avec cette question :
Dans notre vie chrétienne, comment être « en train de veiller » ?
Comment attendons-nous la visite du Seigneur ?
Attendons-nous le jour de notre mort, ou la fin des temps, pour nous trouver face à lui ?
Nous ne connaissons ni le jour ni l’heure de sa venue.
Il vient à l’improviste, mais il « pré-vient » : il frappe à la porte…
Et peut-être qu’il prend alors le visage de celui qui me demande un simple verre d’eau, ou qui me demande un service, un peu d’écoute ou d’attention, une parole de consolation.
Sommes-nous prêts à lui ouvrir la porte, chaque fois qu’il vient au cœur même de notre existence ?
A chacun d’être veilleur !
« Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. »
« Heureux le peuple dont le Seigneur est le Dieu »
Amen
!
Emmanuel MÉRIAUX, diacre permanent
Paroisse Saint Louis de Montfort
10
août 2025