Quelle
scène d’Évangile
étonnante pour ce dimanche où nous célébrons le Christ-roi de
l’univers ! Jésus,
en accusé, les mains liées, devant Pilate, assis sur son trône. Pilate
cherche
à résoudre son problème vis-à-vis des juifs qui réclament la mort de
Jésus,
mais il jettera l’éponge, en se lavant les mains.
Vous
connaissez la suite…. Oublions donc les têtes couronnées que nous
présentent
les médias. Nous en sommes très, très loin… La royauté de Jésus n’est
pas de
cette nature. Jésus s’est toujours dérobé à la foule qui voulait le
faire roi.
Devant
Pilate, c’est
au moment où il est condamné, humilié, enchaîné, que Jésus va affirmer
clairement que « sa royauté ne vient pas de ce monde. » La
royauté du
Christ est une réalité difficile à appréhender. Elle nous paraît
paradoxale : Il est roi, avec les attributs de puissance que lui
donnent le
livre de Daniel, l’Apocalypse et le psaume ; mais Jésus se déclare
roi, au
moment précis où il est au plus bas. Essayons donc d’y voir un peu plus
clair. Mais
nous n’épuiserons jamais cette réalité du Christ Roi qui ne sera
clairement manifestée
qu’à la fin des temps.
Jésus
Roi de
L’univers. Dans le livre de l’Apocalypse, Saint Jean nous présente le Christ
ressuscité : « Moi, je suis l’alpha et l’oméga, dit le
Seigneur,
Celui qui est, qui était et qui vient, le Souverain de l’univers ».
Alpha
et oméga, première et dernière lettre de l’alphabet grec, signifient
qu’il est
le commencement et la fin de tout. Toute l’histoire Humaine converge
vers Lui.
Il est donc la clé pour comprendre le sens de l’univers et le sens de
notre
existence sur cette terre. Son trône, c’est l’univers entier. Le psaume
célèbre
le Dieu créateur qui s’est revêtu de « magnificence et de
force ».
« Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera
pas ». Cette
image de Dieu nous la partageons avec les juifs et les musulmans qui ont
une
grande conscience de la transcendance de Dieu.
Mais
pour nous
chrétiens, la royauté du Christ lui est donnée par son Père, dont Jésus
est le
« témoin fidèle ». Elle n’a pas sa source dans le monde :
« Non
ma royauté ne vient pas d’ici » « Je suis né, je suis venu
dans le
monde pour ceci : rendre témoignage à la Vérité ». Son royaume
c’est
celui de la vérité. La vérité réside en Dieu, c’est Dieu-lui-même. La
vérité ne
nous appartient pas, nous ne pouvons la découvrir qu’en nous mettant à
l’écoute
de Jésus. « Tout homme qui appartient à la vérité écoute ma
voix ».
Le royaume de Jésus, c’est un royaume éternel, un royaume de vérité et
indissociablement, un royaume d’amour.
C’est
au moment où
Jésus donne sa vie pour l’humanité, que le vrai visage de Dieu se
révèle. « Dieu n’est
qu’amour ». Prenons un
moment pour contempler ce roi sur sa croix : son trône, c’est la
croix ;
sa couronne, une couronne faite d’épines tressées par les soldats ;
on l’a
dépouillé de ses vêtements, il est entre deux brigands, bref, il est le
rebut
de l’humanité. En se soumettant à une telle violence, le Christ affiche
que sa
royauté n’est pas de l’ordre de la domination, ni du rapport de force.
Elle est
de l’ordre du don de la vie et de l’amour. Le paradoxe, c’est que la
croix du
Christ est une prise de pouvoir sur le mal et « le dernier
ennemi, qui
sera anéanti, c’est la mort » dit Saint Paul aux Corinthiens (1 Co
15,26).
Oui, la croix est une victoire sur tout ce qui peut conduire l’humanité
à sa
perte. Cette croix du Christ ne prend son sens qu’avec la résurrection.
Elle
ouvre à la vie. Elle est source de notre Espérance.
C’est
pour cela que
nous ne pouvons pas désespérer de notre monde. Jésus nous confie le
monde,
aujourd’hui pour faire advenir le royaume de Dieu qui est en germe.
Nous
pouvons nous lamenter sur tous les drames : le pouvoir insolent de
l’argent qui écrase les petits et les pauvres, la guerre en Ukraine, en
Israël
et Palestine, au Soudan et ailleurs dans le monde, les murs qui
s’érigent partout,
le dérèglement climatique. Mais, comme chrétiens, gardons
l’Espérance : le
Christ sur sa croix a pris le pouvoir sur tous ces démons, en acceptant
d’être
mis à mort injustement. C’est à nous, ses disciples, de poursuivre,
cette œuvre
de libération pour qu’advienne le Royaume de Dieu. La Croix et la
Résurrection
nous donnent l’espérance que ce monde ne va pas à sa perte : Dieu
rassemblera tous ses enfants dans son amour à la fin des temps. Oui, le
Christ
est bien l’alpha et l’oméga. C’est lui qui donne sens à l’aventure
humaine.
A
nous de travailler
à l’avènement de ce Royaume. Dans cette marche vers le Royaume, nous
sommes
tous appelés à faire la vérité en nous et entre nous. Ce chemin exigeant
de
« l’amour dans la vérité », selon l’encyclique de Benoît XVI,
nous
conduit au Christ qui est « le chemin, la vérité et la vie ».
La vérité
dans l’amour fraternel nous fait exister et accéder aux prémices du
royaume de Dieu.
Le mensonge, le non-respect de l’autre fourvoient l’homme et
l’entrainent sur
une voie sans issue… Aujourd’hui, le concept de « vérité
alternative »,
conduit à nier ou à dénaturer les faits. Il est extrêmement dangereux.
Selon
certains, nous sommes entrés dans l’ère de la « post-vérité »
où le
vrai et le faux n’ont plus aucune importance. Le Pape François insiste
pourtant
pour dire que les faits sont supérieurs aux idées. Les faits s’imposent.
Dénaturer les faits pour servir ses propres idées ou ses propres
intérêts, au
niveau personnel ou sociétal, est une grave erreur aux conséquences
diaboliques.
La vérité est une.
Deux autres qualificatifs que nous trouvons, aux côtés de Vérité pour désigner Le Royaume du Christ sont Justice et Paix : Là aussi le travail n’est jamais fini, mais si nous mettons notre confiance et notre espoir dans Le Christ, nous pouvons dire avec Saint François d’Assise :
« Seigneur,
fais de moi un instrument de
ta paix.
Là
où est la haine, que je mette l’amour.
Là
où est l’erreur, que je mette la vérité.
Là
où est le désespoir, que je mette l’espérance ».
Yves
MICHONNEAU,
diacre permanent
Paroisse
Bienheureux Célestin et Michel en Val de Cens
Le
24 novembre 2024