Quand des jeunes parents viennent demander à la
paroisse
le baptême pour leur bébé, ils disent généralement lors des rencontres
de
préparation : «
nous
voulons lui transmettre les valeurs chrétiennes ».
Ces parents n’ont pas toujours les mots pour
exprimer ce que sont « les valeurs chrétiennes » mais ils sentent bien,
au fond
d’eux-mêmes, qu’il ne leur suffira pas de fournir des biberons et des
vêtements
à leur enfant, ni même de l’inscrire à l’école, pour lui donner des
RAISONS DE
VIVRE, au-delà des MOYENS DE VIVRE...
Ils pressentent qu’au-delà de la vie biologique
qu’ils ont donnée, leur enfant va recevoir la vie d’enfant de Dieu par
le
baptême, et qu’il sera donc appelé à en témoigner par sa vie d’enfant,
de
jeune, puis d’adulte.
Et pour cela, il devra découvrir d’autres valeurs
que celles que la société et le monde mettent en avant.
Nous pourrions chacun nous poser la question : pour moi, c’est quoi les « valeurs
chrétiennes » auxquelles je suis attaché ?
Qu’est-ce
qui
a de l’importance, du sens, du poids dans ma vie et dans ma Foi ?
Quelles
sont
les valeurs dont je veux témoigner, et que je veux transmettre comme un
trésor à mes enfants, à mes petits enfants ?
Et
la
question subsidiaire :
comment la vie et le message de Jésus m’éclairent-ils ?
Ecoutons le dialogue de Jésus avec ses
disciples :
Il est question de baptême, et de grandeur. Et Jésus bouscule ses disciples, parce que :
L’Evangile, c’est le renversement des valeurs, des certitudes, et des hiérarchies :
-
le maitre se fait le
serviteur (monde à l’envers ! )
-
et le Messie donne sa
vie « en rançon pour la multitude » (ce n’est
pas du tout
ce qui était attendu depuis des siècles).
C’est le cœur de notre Foi mais,
comme les disciples, nous avons bien du mal à le comprendre, et à
changer notre
regard sur Jésus ! Jésus – sauveur.
Par trois fois, Jésus avait annoncé à ses disciples
sa
Passion, sa mort, et sa résurrection. Mais les disciples ne comprenaient
pas
encore ce que signifiaient ces mots : si Jésus est le Christ, il
était
impensable qu’il souffre et qu’il meure. C’était « incroyable » au sens premier du terme, parce que c’était un échec total au regard humain.
Et nous aussi, on a parfois du mal à regarder en
face la mort du Christ sur la Croix…
Dans l’évangile de ce dimanche, l’incompréhension
des disciples se double de maladresse et de naïveté. Les deux fils de
Zébédée,
les « fils du tonnerre », se détachent du groupe des 12 et
adressent
à Jésus une demande bien téméraire : « Donne-nous de siéger,
l’un à ta
droite et l’autre à ta gauche, dans ta gloire. »
Alors Jésus va « renverser de leur trône » ces
deux
audacieux, ainsi que les 10 autres disciples, par un double renversement
de leurs certitudes, et de leurs valeurs établies.
Et c’est valable aussi pour nous aujourd’hui.
Premier renversement des valeurs et des
certitudes
:
La royauté de Jésus n’est pas de ce monde. Sa gloire
passera par le don de sa vie, jusqu’à la Croix. « Donner sa vie en rançon pour la multitude ».
Dans la Bible, le mot de « rançon » est synonyme de
« libération ».
Jésus
annonce
qu’il va payer, par le prix de sa vie, notre libération de
l’esprit de domination et d’orgueil dont sommes les prisonniers :
en payant
le prix fort, en mettant librement tout le poids de sa vie dans la
balance, et en disant « BANCO ! » Jésus abolit le pouvoir de
toutes les forces du mal, de tous les asservissements par la force, par
la
contrainte, et par la violence. C’est de tout cela qu’il nous sauve.
1er renversement : le Messie et venu pour donner sa vie en rançon, et
non pas pour dominer ou pour nous asservir. Le Don de soi, c’est une VALEUR.
Et le 2nd renversement des valeurs et des
certitudes vient aussitôt après.
Dans la suite du dialogue, Jésus met en garde les 10
autres disciples – qui étaient un peu indignés par la demande des deux
frères,
mais peut-être eux même désireux de jouer les premiers rôles au
gouvernement du
Royaume des cieux : « Celui qui veut devenir grand parmi vous
sera
votre serviteur. Celui qui veut être parmi vous le premier sera
l’esclave de
tous. »
Le second renversement, c’est que Dieu va prendre le
tablier du Serviteur. Et c’est comme cela
aussi
qu’il va nous sauver : non pas en nous regardant d’en haut, de loin,
mais en prenant
notre condition d’homme en Jésus, à nos côtés. En prenant le tablier du
Serviteur, Il nous rejoint en bas, là où nous sommes, dans notre
condition
humaine, et Il renverse l’idée que nous nous faisons de Lui : celle
d’un
Dieu lointain et dominateur. Jésus
n’est
pas Jupiter, ni BRUCE tout puissant !
Le Service, c’est une VALEUR.
Par ces deux renversements, Jésus met en valeur : le Don de soi, et le sens du Service,
Il
invite
ses disciples, et il nous invite, à faire de même.
Il
a donné
l’exemple par sa propre vie : une
fois pour toutes, une fois pour
tous.
Saint Charles de Foucauld a fait cette remarque : « Jésus a tellement pris la dernière place que personne n’a pu la
lui ravir ». Il s’est abaissé pour nous tendre la main,
et
pour
nous élever, pour nous relever des pesanteurs de notre condition
humaine.
Et
puisque
nous sommes créés à l’image de Dieu, nous pouvons unir notre vie à la sienne, et devenir
participants de son Royaume.
XXI siècles après, nous avons reçu la transmission
de la Bonne Nouvelle par la succession des apôtres. Le renversement des valeurs que Jésus annonce nous ouvre un chemin de
conversion, dans le monde dans lequel nous vivons :
«
Les grands font sentir leur pouvoir. Parmi vous,
il ne doit pas en être ainsi » dit Jésus.
Les valeurs du royaume de Dieu à construire à ses
côtés se nomment : Service, don de soi, humilité, générosité,
partage ;
à nous d’en vivre, et, si nous les faisons nôtres, à nous de
transmettre ces valeurs aux bébés qui seront baptisés cette année.
Alors, pour terminer, je voudrais vous partager une
belle prière qui parle du Service. C’est la prière scoute : peut-être que
certains bébés baptisés cette année deviendront scouts ?
Seigneur Jésus,
Apprenez-nous
à
être généreux,
A
Vous
servir comme Vous le méritez
A
donner
sans compter,
A
combattre sans souci des blessures,
A
travailler sans chercher le repos,
A
nous
dépenser, sans attendre d'autre récompense,
Que
celle
de savoir que nous faisons Votre Sainte Volonté.
Amen
Emmanuel MÉRIAUX, diacre permanent
20 octobre 2024 - Paroisse Saint Louis de Montfort
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