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dimanche de l'Avent.
Is 7, 10-16, Ps 23 ;
Rm 1, 1-7 ; Mt 1, 18-24
C’est le dernier ! dernier dimanche de l’Avent.
Dernier dimanche avant Noël.
Ce Noël qui vient, va-t-il aussi être le dernier ? Vous
l’avez sans doute remarqué, si je jour de Noël est toujours attendu avec
autant de fébrilité par les enfants, le mot Noël, lui, est de plus en
plus absent. Dans les cartes de vœux que nous recevons, dans les
décorations toutes illuminées de nos villes, dans les médias, dans les
grands magasins et les supermarchés, le « joyeux Noël ! »
cède la place à « joyeuses fêtes », au pluriel, englobant la
fête de la Nativité dans un grand événement festif de fin d’année. Comme
pour mettre la fête païenne qui célèbre la nouvelle année au même niveau
que la fête de Noël. Comme pour minimiser Noël ? pour
l’étouffer ?
Il
faut dire que Noël dérange. La fête de Noël nous arrange, mais Noël
dérange. Il n’y a qu’à voir les polémiques qui reviennent chaque
année autour des crèches. N’en soyons pas étonnés : l’événement de
Noël est dérangeant par nature, puisqu’il célèbre le surgissement de
Dieu dans notre Histoire humaine. Ça ne peut pas ne pas déranger !
À Noël, Dieu se fait homme ; Dieu, l’inconnaissable, se fait
connaître, en se rendant visible !
Mais
Dieu ne se rend pas visible comme le feraient d’autres divinités, dans
une apparition, dans une fulgurance extraordinaire. Non, Dieu a fait le
projet de se révéler en se faisant homme à la manière de tous les
hommes : en devenant d’abord un bébé ordinaire, né dans une famille
humaine, un couple humain. Le foyer de base : un père, une
mère, un enfant. Rien que de l’ordinaire.
Et
pour réaliser ce projet de naissance, Dieu a donc dû préparer
Marie ; on le sait, c’est l’Immaculée Conception. Préparation sur
un long terme, dans la durée, en préservant de toute souillure du péché
l’écrin qui devait porter son enfant. Mais il a fallu aussi préparer
Joseph. C’est ce que nous raconte l’évangile d’aujourd’hui. Préparation
plus tardive, presque au dernier moment ! Joseph lui-même apprend
le projet de Dieu, et sa propre implication dans ce projet, alors que
l’enfant est déjà en route ! Pour Joseph aussi, Noël, ça
dérange ! ça oblige à se remettre en question ! Il fallait
quand-même que Dieu ait une belle confiance en Joseph, pour être sûr
qu’il adhère à son projet de naissance. Il fallait que Joseph soit un
homme fiable.
L’évangéliste
nous dit d’ailleurs que Joseph « était un homme juste ».
On comprend ici tout le sens biblique du mot « juste » :
Joseph s’ajuste à la volonté de Dieu. À son réveil, « il fit ce
que l’ange du Seigneur lui avait prescrit » nous dit-on.
Pourtant, ce que l’ange lui avait prescrit, ça n’allait pas de
soi ! Ce n’était pas du tout ce que Joseph avait envisagé !
Malgré tout, Joseph va très simplement adhérer au projet de Dieu ;
sans forcément tout comprendre, il va entrer dans ce projet, et accepter
de jouer son rôle, de faire passer la volonté de Dieu avant ses propres
désirs. Parce que le projet de Dieu, c’est une bonne nouvelle !
Cette
bonne nouvelle, c’est le signe promis par Dieu à son peuple, sept
siècles auparavant. C’est la prophétie qu’Isaïe adresse au roi Acaz dans
notre première lecture : « Voici que la jeune femme est
enceinte, elle enfantera un fils qu’elle appellera Emmanuel,
c’est-à-dire : Dieu avec nous »
Dieu
avec nous. la voilà, la bonne nouvelle ! À ce roi Acaz, descendant
de David, qui doute de la promesse de Dieu, Isaïe rappelle que Dieu
tiendra sa promesse, envers et contre tout. Même dans les moments de
grande difficulté, dans les temps d’incertitude et d’angoisse, comme au
temps du roi Acaz où l’existence même du peuple de Dieu était
menacée ; dans les moments de doute, les périodes de souffrance, où
on n’y voit plus très clair, où on ne ressent plus la présence de Dieu à
nos côtés ; il est là, Dieu avec nous, aujourd’hui comme hier et
comme demain. Même si nous doutons, même si nous l’oublions, même si
nous sommes infidèles, Dieu, lui, reste fidèle et n’oublie pas sa
promesse.
C’est
aussi le doute qui hante l’esprit de Joseph, à ce moment de son
existence où il s’apprête à accueillir chez lui Marie, son épouse. Il
apprend qu’elle est enceinte. Mettons-nous à sa place ! Quelle
épreuve ! Comment réagir ? Que faire ? Joseph est
tourmenté par cette situation, et cherche à discerner pour prendre la
bonne décision. C’est alors que Dieu, par son ange, lui envoie un songe,
dans lequel va résonner en lui la promesse de Dieu, qu’il avait lue dans
le livre d’Isaïe, la prophétie révélée au roi Acaz : « Voici
que la jeune femme est enceinte, elle enfantera un fils qu’elle
appellera Emmanuel, c’est-à-dire : Dieu avec nous ».
« Et si c’était maintenant ? » se dit Joseph. N'est-il
pas lui-même, justement, un descendant de David ? de cette lignée
d’où sortira le Messie tant attendu ? En adoptant cet enfant à
naître, et donc en accueillant chez lui Marie, son épouse, il sait qu’il
permet à la prophétie d’Isaïe de se réaliser, à la promesse de Dieu de
devenir réalité. Il fait confiance à cet ange du Seigneur apparu en
songe, au point qu’il va suivre sa prescription, malgré la crainte des
conséquences immédiates qu’il devra subir.
On
le sait, la révélation de la nature divine de cet enfant, sa qualité de
Messie, de Christ, ne se fera pas tout de suite. Il faudra attendre une
trentaine d’années pour qu’elle soit manifestée au grand jour. Joseph ne
sera sans doute plus là pour la voir. Mais il accepte de se laisser
guider par Dieu, non pas pour lui-même, mais pour que s’accomplisse la
Promesse pour l’humanité entière : Dieu vient, l’Emmanuel, Dieu
avec nous. Voilà pourquoi Joseph est un modèle. Cet homme dont on ne
sait pas grand-chose, cet homme qui ne dit rien, dont les évangiles ne
nous rapportent aucune parole, est le modèle de la fidélité à Dieu,
l’archétype de l’homme juste, de l’homme ordinaire ajusté à Dieu.
Cette
promesse, cette bonne nouvelle, c’est ce que la langue grecque désignera
par le mot Évangile. C’est pourquoi St Paul commence sa lettre aux
Romains en leur rappelant cette promesse d’espérance, cette « Bonne
Nouvelle », l’Évangile de Dieu pour lequel l’apôtre a consacré sa
vie : la présence désormais permanente de Dieu à nos côtés.
Bonne
nouvelle qui est toujours d’actualité. Si nous en prenons conscience,
chaque jour de notre vie, alors cette connaissance de la promesse de
« Dieu avec nous » doit nous stimuler, nous porter, même à
travers les épreuves. Nous rappeler que Dieu est avec nous doit nous
aider à discerner, lors de nos prises de décision, grandes ou petites.
Comme Joseph, l’homme juste, ajustons-nous à la volonté de Dieu ;
nos décisions seront alors emplies de justice, et nous contribuerons,
comme Joseph, à faire advenir le projet de Dieu. Noël vient d’Emmanuel,
c’est Dieu avec nous, c’est donc tous les jours !
Alors
non, rassurons-nous, ce Noël qui vient dans quelques jours ne sera pas
le dernier ! Si nous avons tendance à oublier Dieu, Dieu, lui,
reste fidèle. Il continue avec nous ce qu’il a commencé, il continue
d’honorer sa promesse : « je suis avec vous tous les jours
jusqu’à la fin du monde »
C’est Noël sur la terre chaque jour
Car Noël Ô mon frère, c’est l’amour
Daniel
BICHET, diacre permanent
Maisdon sur Sèvre et Clisson
18 décembre 2022