4° dimanche de l'Avent.
Is 7, 10-16, Ps 23 ; Rm 1, 1-7 ; Mt 1, 18-24
Nous voici parvenus au 4ème
dimanche de l’Avent, à quelques jours de la solennité de la Nativité du
Seigneur, où nous faisons mémoire d’un événement si simple, une
naissance, et à la fois si extraordinaire : Dieu s’humanise en
nouveau-né pour épouser la condition humaine et partager avec elle la
plénitude de l’amour donné et reçu. Nous nous préparons à commémorer
cette naissance, première venue du Seigneur parmi nous, et nous
veillons toujours dans l’attente de la seconde venue du Seigneur, dans
la gloire, lorsque l’humanité sera prête à vivre cette rencontre ultime
et définitive.
Nous vivons donc, d’une certaine
manière, un « déjà là » – le Seigneur est venu, il est mort et il est
ressuscité des morts –, et un « pas encore » – nous poursuivons notre
pèlerinage terrestre, prélude à notre vie divine, partagés aujourd’hui
entre les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses de
notre monde contemporain, comme le Concile Vatican II l’a exprimé il y
a une cinquantaine d’années. Pour autant, nos prédécesseurs dans la foi
ont-ils vécu un chemin plus simple que le nôtre ? Ce n’est pas certain.
Les textes de la liturgie de ce dimanche sont d’un réalisme saisissant,
nous dévoilant en particulier la situation délicate vécue par deux
hommes, à deux moments très différents de l’histoire sainte : Acaz, roi
de Juda au 8ème siècle avant J.C., et Joseph, époux de Marie.
Acaz, roi de Juda, est attaqué
par les rois d'Israël et de Damas qui veulent l'entraîner dans leur
combat contre l'Assyrie, pays puissant en train de s'imposer sur tout
le Proche-Orient. Acaz juge préférable de se soumettre à l'Assyrie
moyennant tribut. Le prophète Isaïe, non seulement s'oppose à cette
politique frileuse, mais il prédit l'échec prochain des royaumes
d’Israël et de Damas. L’histoire donnera raison à Isaïe : quelque temps plus tard, les
royaumes de Damas puis Israël tomberont et ce sera la grande
déportation à Babylone.
Dans des situations obscures, on a
souvent besoin de signes pour prendre les décisions les mieux adaptées
et envisager l'avenir avec confiance. L'essentiel de l’oracle d’Isaïe
réside dans un signe à double portée de la part de Dieu : la naissance
d'un enfant est un gage d'espérance pour l'avenir ; et son nom, « Dieu
est avec nous » donne l'assurance de la présence de Dieu au milieu du
peuple. Mais la portée du signe annoncé par Isaïe laissa de marbre le
roi Acaz.
Quant à Joseph, il est dans une
situation matrimoniale bien difficile : il est fiancé à Marie. Dans la
tradition juive, les fiancés étaient liés comme s’ils étaient déjà
mariés, mais ne commençaient à vivre ensemble qu’après les formalités
du mariage. Et si le mariage n’avait pas lieu parce que le fiancé
changeait d’avis ou pour quelque raison valable, il fallait un acte de
répudiation devant témoins. Joseph apprend que Marie est enceinte, elle
l’aurait donc trompé ? Aimerait-elle un autre homme ? Joseph était prêt
à la répudier en secret. Il a eu bien besoin d’un signe pour comprendre
qu’il n’avait pas à répudier Marie, mais à la prendre comme épouse, en
accueillant en même temps la promesse divine de la naissance de Jésus
pour toute l’humanité, ce que les prophètes avaient entrevu. Ce n’est
pas pour autant facile, ce que Joseph accepte, même s’il a la
conviction intime que le songe est authentique : c’est bien le Seigneur
qui l’appelle pour accueillir le fils de Dieu pendant le temps de
l’enfance, de l’adolescence et des premiers pas d’une vie
professionnelle à ses côtés.
Oui, dans les troubles de notre
vie, comme Acaz et Joseph, nous avons besoin de signes, de ces paroles
entendues, ou simplement perçues dans le for interne, pour nous
orienter dans le brouillard de l’indécision et du doute. S’en remettre
à la force des armées comme Acaz, à la loi de son peuple comme Joseph,
conduit à une impasse. Le Seigneur s’adresse à chacun là où il en est,
suscitant la confiance sans remettre en cause la liberté de choix. Acaz
ne suivra pas, Joseph fera confiance, probablement avec beaucoup
d’appréhension et d’interrogations tout au long des années qui suivront.
Dans notre existence, nous
trouvons peut-être le Seigneur bien discret. Mais une relecture de nos
vies nous conduirait sans aucun doute à retrouver, ici et là, ces
petits signes que nous recevons du Seigneur, imperceptibles au moment
où ils arrivent, mais en fin de compte si éclairant pour nos existences.
D’ici à Noël, demandons au
Seigneur, qui vient à notre rencontre à chaque eucharistie, de nous
rendre davantage attentifs aux signes qu’il nous offre, afin de nous
orienter vers l’essentiel dans notre vie humaine de chaque jour.
Christophe DONNET, Diacre permanent
Paroisse Saint-Benoît, Diocèse de Saint-Étienne
22 Décembre 2019